1. |
Intro
00:41
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2. |
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C’est arrivé le jour où
la fille avait cueilli des bizarres chatons de saule.
Sa tête gonfla et blanchit, tout,
en devenant, tel un oreiller, molle.
Sa peau, qu’enlaidit d’une texture
floconneuse de vilaine allure
devint ensuite une couverture
de coton 100% pur.
A travers ses organes et son torse,
elle poussa comme des sortes
d’ailes, et une belle literie en résulta,
ressorts et matelas.
Étrange et terrible chose!
Je commençai par verser des larmes,
mais j’eus pour dormir, après la métamorphose
un lieu plein de charmes.
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3. |
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Un matin, au sortir d’une nuit agitée, Grégoire Samsa s’éveilla transformé dans son lit en une véritable vermine. Il était couché sur le dos, un dos dur comme une cuirasse, et, en levant un peu la tête, il s’aperçut qu’il avait un ventre brun en forme de voûtes divisé par des nervures arquées. La couverture, à peine retenue par le sommet de cet édifice, était près de tomber complètement, et les pattes de Grégoire, pitoyablement minces pour son gros corps, papillotaient devant ses yeux.
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4. |
Dos
00:37
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Des dos,
Ce ne sont que des dos,
des dos à jamais dos,
en attente de fardeaux
qui gémissent,
meurtris,
ployant sous l'excès de la honte ;
non pas des dos humains,
mais de tristes dos d'animaux
écorchés,
mangés de blessures,
qui ne trembleront jamais au désir
d'ébranler le monde,
de jeter bas leurs infamantes fardeaux.
Des dos,
une humilité crispée,
destructrice,
une chaîne de monts bosselés
dans le silencieux désespoir muet.
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5. |
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Il avait l’habitude de dormir sur le côté droit et ne pouvait parvenir dans sa situation présente à adopter la position voulue. Il avait beau essayer de se jeter violemment sur le flanc, il revenait toujours sur le dos avec un petit mouvement de balançoire. Il essaya bien cent fois, en fermant les yeux pour ne pas voir les vibrations de ses jambes, et n’abandonna la partie qu’en ressentant au côté une sorte de douleur sourde qu’il n’avait jamais éprouvée.
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6. |
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La douleur tiraille encore plus
au gel des jours présents
Le muscle
ou le nerf
ou le je ne sais quoi refroidit
je me demande comment je finirai la journée
Mais bon
on finira bien par finir,
avec cette douleur
en haut de la fesse gauche.
plus qu'une demi-heure
une grosse demi-heure
puis une petite demi-heure
plus que dix minutes
Personne ne parle
sinon pour se dire
à la fin
« A demain »
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7. |
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Les reins se creusent ;
mais,
par compensation,
le cul avance et bombe
en forme de croupion ;
Mon écorce s'allonge à craquer
par devant,
tandis que, par derrière,
elle se fronce toute ;
et mon corps
semble un arc
dans le poing qui se tend.
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8. |
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Il entendit frapper à la porte, à côté de son chevet, tandis que le réveil sonnait les trois-quarts d’heure. «Grégoire! Appelait-on – c’était sa mère – Il est sept heures moins le quart. Est-ce que tu ne voulais pas prendre le train?» La douce voix!
Grégoire frémit en s’entendant répondre. On reconnaissait bien son organe, il n’y avait pas à s’y méprendre, c’était bien lui qui parlait, mais il se mêlait à sa voix un piaulement douloureux, impossible à réprimer, qui semblait sortir du tréfonds de son être, et qui ne laissait aux mots leur vraie figure que dans le premier instant pour brouiller ensuite leur résonance au point qu’on se demandait si l’on avait bien entendu. Grégoire aurait voulu détailler sa réponse, mais dans ces conditions, il se contenta de dire «si, si, merci maman. Je me lève».
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9. |
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Tout ce qui se suce de la langue,
une fois qu'elle a trempé
dans nos pensée ...
Tout ce qui se suce de la langue
absorbe.
Nous absorbe.
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10. |
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Il n’eut aucun mal à rejeter la couverture; il se gonfla un peu et tomba d’elle-même. Mais ensuite Grégoire se sentit gêné par sa carrure formidable. Pour se lever, il lui aurait fallu des bras et des jambes et il ne possédait que de petites pattes en vibration continuelle sur lesquelles il n’avait aucun moyen d’action. Avant d’en pouvoir plier une il lui fallait d’abord s’étirer, et, quand il arrivait à exécuter le mouvement voulu, toutes les autres se déchaînaient sans contrôle, le faisant souffrir atrocement.
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11. |
Le plus chiant,
00:39
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Le plus chiant,
c'est de retrouver le bout de doigt par terre.
Avec le sang
et tous les bouts de viande
qui traînent en permanence,
un bout de doigt,
t'as vite fait de le louper.
Couille du bras élévateur mécanique.
Doigt coincé.
Sectionné.
Au niveau du majeur.
Un gamin de 22 berges
qui bosse ici comme tant d'autres
en attendant mieux.
En l'occurrence
une formation d'électricien
que Pôle Emploi refuse de lui payer.
Un doigt coupé.
La greffe n'a pas pris.
Voilà pour la nouvelle du jour.
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12. |
Pour sortir
00:41
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Pour sortir [du lit], il essaya d’abord de commencer par l’arrière-train; malheureusement cet arrière-train, qu’il n’avais pas encore vu et dont il ne se faisait pas une idée précise, se révéla à l’expérience très difficile à mouvoir; la lenteur du procédé l’exaspéra; il réunit toutes ses forces pour se jeter en avant, mais, en ayant mal calculé sa trajectoire, il se heurta violemment contre l’un des montants du lit, et la cuisante douleur qu’il en ressentit lui apprit que la partie inférieure de son corps était sans doute la plus sensible.
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13. |
Escarre
00:20
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L’escarre est une complication
fréquente
de la peau et des tissus sous-cutanés,
consécutive
à un défaut d’oxygénation du tissu
provoqué par une pression
excessive
et prolongée.
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14. |
Il voulut donc
00:33
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Il voulut donc, changeant de tactique, commencer par le haut du corps et tourna prudemment la tête vers le haut du lit. Il y réussit sans peine, et le reste de sa masse, malgré son poids et son volume, finit par suivre et s’orienter du même côté. Mais quand la tête fut sortie et qu’elle pendit dans le vide, Grégoire eut peur de continuer; s’il tombait dans cette position, il se briserait le crâne à moins d’un miracle, et ce n’était pas le moment de perdre ses moyens.
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15. |
Le crâne
00:19
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Le crâne
forme le squelette de la tête.
Son principal rôle
est de protéger le cerveau,
les organes sensoriels particuliers
et les parties crâniennes des systèmes respiratoire et digestif.
Il fournit
aussi
des points d’insertion à la plupart des muscles du cou et de la tête.
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16. |
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Pourtant, lorsque, poussant un soupir après tant de peine, il se retrouva étendu comme auparavant, lorsqu’il vit ses petites pattes se livrer bataille avec plus d’acharnement que jamais, désespérant de trouver aucun moyen de restaurer la paix et l’ordre dans cette société despotique, il recommença à croire qu’il ne pouvait absolument pas rester au lit et qu’il fallait raisonnablement tout sacrifier à la plus petite chance de sortir de là.
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17. |
J'ai vu le toubib hier.
00:48
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J'ai vu le toubib hier.
Mon orteil :
mycose.
L'ongle du gros orteil.
Violacé
Trois mois qu'il est violet
Trois mois que je suis à l'usine
L'humidité
Les bottes partagées
Rien de mortel
Juste une petite douleur
et une mocheté
sur un bout de pied
Ce ne sera jamais une maladie professionnelle
des champignons à l'orteil
Ce ne sera jamais la silicose
Aujourd'hui
j'ai opéré de la béchamel
J'ignore combien de cuve j'ai mixées
J'imagine
qu'avec des champignons
la crème aurait été meilleure.
Ceux de nos pieds,
par exemple.
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18. |
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Et il se mit à se balancer sur le dos pour sortir du lit dans toute sa longueur et d’une seule pièce. […] Quand il eut une moitié du corps hors du lit- avec la nouvelle méthode c’était plutôt un jeu qu’une corvée- il n’y avait qu’à se balancer par secousses – il se mit à penser à la facilité avec laquelle il aurait pu se lever s’il avait eu un peu d’aide. Deux personnes fortes comme son père et la bonne auraient amplement suffi. […] A cette idée, malgré tout son malheur, il ne put réprimer un sourire.
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19. |
Le sourire de l'ange
00:30
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Le sourire de l'ange) est une cicatrice causée par l'élargissement au couteau de la bouche de la victime jusqu'aux oreilles, ce qui laisse une cicatrice en forme de sourire.
La pratique est réputée provenir de Glasgow, en Écosse dans les années 1920 et 19305, mais elle s'est répandue avec les gangs de rue de Londres.
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20. |
Mon corps
00:40
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Mon corps, je t’oublie trop
Je te regarde pas là où il faut
Mon corps, j’examine tes bords
Je vois ton dehors, je vois tes défauts
Mon corps, je t’en ai voulu
D’ailleurs, je t’en veux encore
Même si je sais qu’au fond, j’ai tort
Mon corps, sans toi, je suis rien
Je fais le malin
Je vais te retrouver
Mort
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21. |
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Aujourd’hui, elle porte une robe bleu clair à bretelles. Elle lui descend aux genoux. Il y a une marque de craie au niveau de l’ourlet qu’elle n’a pas encore remarqué. Elle n’a pas mis de soutien-gorge. Elle s’est rasée sous les bras: ses jambes ont l’air lisses, douces. Elle a posé un vernis clair sur ses ongles de pieds, mais il commence à s’écailler au niveau du pouce gauche. Ses sandales bleus marine sont plates, vieilles, usées. Elle est bronzée; Les poils de ses bras sont dorés. Parfois j’aperçois le dessous laiteux de ses bras, la peau plus blanche derrière ses genoux; […]
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22. |
Ta peau
00:15
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Ta peau : aurore
La mienne : crépuscule
L'une peint
le début d'une fin certaine.
L'autre,
la fin d'un certain crépuscule.
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23. |
La peau
00:11
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La peau couvre toute la surface du corps humain (environ 1,5 à 2 m²). Elle compte pour 7% du poids du corps et pèse quelque 4 kg.
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24. |
Un sein se sent seul
00:43
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Un sein se sent seul
dans son coin.
Ce sein se serre contre son frère,
son soutien,
cherche à combler sa solitude.
La main se laisse emporter,
happe le sein,
voulant,
sans réserve,
le posséder.
Mais le sein tient
à sa liberté.
Il se débat,
en redemande,
repousse les caresses,
et voudrait que ça cesse.
L'élan est contenu,
mais
pour combien de temps ?
Le sein est cerné.
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25. |
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Ses cheveux sont relevés en chignon lâche au-dessus de sa tête. Ils se sont décolorés au soleil, ce qui fait qu’ils sont plus foncés en-dessous. Elle porte de petites boucles d’oreilles argentées, en forme de petite fleur. De temps en temps, elle les fait tourner entre son pouce et son index. Les lobes de ses oreilles sont assez longs. Elle a un sillon vertical assez prononcé au-dessus de la lèvre supérieure. Quand elle a chaud comme aujourd’hui la sueur s’y agglutine. De temps à autre elle s’essuie avec un mouchoir en papier [...]Quelques tâches de rousseur éparpillées lui parsèment l’arête du nez; elle n’étaient pas là la dernière fois que j’ai regardé.
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26. |
Tâche de rousseur
00:30
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Un genièvre
tombé sur la neige éclatante.
Un insecte
caché dans une rose
éblouissante.
Un beau raisin doré
dans une friandise.
Un îlot galant
dans les vagues
de ce sein blanc.
Dîtes-moi
s'il est décent d'aimer
ce défaut que Nature
a posé
d'aventure
parmi les roses et les lys.
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27. |
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La tâche jaune sur son médium a disparu. C’est bien. Elle ne met pas de bagues. A son poignet elle porte une montre à gros cadran, avec un Mickey au milieu. Elle l’attache avec un ruban.
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28. |
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Les chères mains qui furent miennes,
toutes petites,
toutes belles,
après ces méprises mortelles
et toutes ces choses païennes,
mains en songes,
mains sur mon âme,
sais-je,
moi,
ce que vous daignâtes
parmi ces rumeurs scélérates,
dire
à cette âme qui se pâme ?
Remords si chers,
peine très bonne,
rêves bénis,
mains consacrées,
ô ces mains,
ces mains vénérées,
faites le geste qui pardonne !
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29. |
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Quand elle rit, elle produit un son carillonnant, comme celui d’une sonnette. […] Un jour, bientôt, elle comprendra. Elle apprendra que la façon dont elle sourit, dont elle ouvre grand les yeux quand elle écoute, la façon qu’ont ses seins de s’aplatir quand elle lève les bras par-dessus la tête, ces choses-là ont de l’importance. […]
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30. |
Un sein se sent seul (2)
00:26
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Un sein se sent seul
dans son coin
ce sein se serre contre son frère,
son soutien,
cherche à combler sa solitude.
Tout à coup,
le sein sent son épiderme frémir
à tâtons,
une main
cherche le sein caché.
Tapi au chaud,
le sein se laisse
à peine
deviner.
Ivresse du sein
qui pointe le téton
comme un témoin.
Celui-ci se durcit,
le sein n'y peut plus rien.
La main
fraye son chemin.
Le sein s'arme,
se réchauffe,
pour repousser l'intruse.
Et l'action se précipite.
La main,
persévérante,
approche.
Le sein est cerné.
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31. |
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Elle sourit trop facilement. Elle rit trop facilement. Elle flirte. Elle porte des vêtements très légers. Je vois ses jambes sous sa robe. Je devine la forme de ses tétons. Elle ne fait pas attention à elle.
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32. |
Corps ouvert
00:32
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je prends
dans la boîte à outils
le nécessaire
(crayons, cutter, colle)
et j'ouvre.
Les organes sont bien à leur place.
Pas de couleur suspecte.
Le sang circule
sans faire trop de bruit.
La taille du cerveau
est moins conséquente que prévu.
Celle du cœur,
dans la normale.
Je cherche,
je cherche,
mais j'ai oublié quoi,
au juste.
Je suis là,
les bras ballants,
sans savoir
comment je vais pouvoir
refermer.
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33. |
Elle a les yeux gris.
00:14
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Elle parle très vite, d’une voix légère, embuée. Elle dit: «ouais», pas oui. Elle a les yeux gris. Elle n’a pas encore peur.
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34. |
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Qu'il est triste
de se coucher seul et nu.
Le silence du salon.
Le sol sans tes pieds nus.
Qu'il est triste
de sentir le goût du sel
qui ruisselle
sur mes lèvres muettes.
La silhouette
du pin parasol,
sensible aux solstices
et aux alizés,
continue,
nuit après nuit,
de s'émietter.
Soupirs imperceptibles dans les azalées.
Ils susurrent que le pire
s'en est venu,
et puis s'en est allé.
Le long des avenues,
bordées de saules,
de buis et de hêtres,
revoir tes épaules
et ta nuque,
souples et hâlées,
passer,
douces comme le soir
et sa lumière ténue.
Le pire,
c'est que ce soir il ait plu.
Et que j'étais couché,
couché seul et nu.
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